Dans la fin des années 70-début 1980, seules les piles (non rechargeables) au lithium étaient commercialisées et produites essentiellement au Japon.
Ces piles montrent une autonomie deux à trois fois supérieure aux piles classiques alcalines. Il était par conséquent très tentant de développer
la version rechargeable de ces piles afin de remplacer les batteries alcalines (Ni-Cd) et celles au plomb acide, trop lourdes et polluantes. Des difficultés sont vite apparues lorsqu’on a constaté que lorsque le lithium métal est utilisé comme matériau du pole négatif (anode), comme c’est le cas des piles au lithium, ce métal alcalin se dépose sous forme de dendrites lors de la charge de la batterie. Les dendrites tendent à percer le séparateur situé entre l’anode et la cathode et créer un court-circuit à l’intérieur de la cellule, la rendant dangereuse au point de provoquer l’explosion de celle-ci. Il fallait éviter la croissance dendritique du lithium. C’est là que fin 1979- début 1980, alors que Rachid Yazami commençait sa thèse à l’INPG, et a eu l’idée d’utiliser une électrode en graphite qui serait susceptible d’insérer le lithium lors de la charge, évitant le dépôt métallique. Ses premiers essais avec un électrolyte liquides furent négatifs. En effet, le solvant organique de l’électrolyte se co-insère avec le lithium provoquant un gonflement excessif de la structure graphitique allant jusqu’à son exfoliation. Et c’est que lui vint une deuxième idée, à savoir utiliser un électrolyte polymère sec (sans solvant) développé dans un laboratoire voisin de l’INPG. Cette fois-ci le lithium seul s’insère entre les feuillets graphitiques réduisant le risque d’exfoliation. Il a aussi montré, en inversant le sens du courant, que le lithium ressort du graphite et de ce fait que l’insertion du lithium est réversible. En plus, le graphite insère une quantité assez importante de lithium à un potentiel électrique très bas. Ces trois propriétés (réversibilité, large quantité et bas potentiel) sont les conditions essentielles requises pour une application comme anode dans un système rechargeable au lithium.
En 1980, il a rédigé un rapport pour l’ANVAR en vue d’un dépôt de brevet. Hélas, le plus grand industriel français des piles et batteries de l’époque contacté, n’a pas jugé cette découverte suffisamment attrayante et le projet de brevet fut abandonné. Il a alors publié nos résultats en 1982 et en 1983.
Concomitant au développement de l’anode et indépendamment de celui- ci, la cathode (pole plus) a base d’oxyde mixte de lithium et de cobalt (LiCoO2) fut mise au point par le Prof. John Goodenough à l’Université d’Oxford en 1979-1980. Le développement et la commercialisation de la batterie lithium ion furent menés au Japon respectivement par le Dr.
Yoshino de Asahi Chemical qui a réalisé le premier prototype en 1985, et par Mr. Nishi de Sony pour la commercialisation en 1991.
En 2014, l’académie nationale américaine des ingénieurs (NAE) a honoré l’invention et le développement de la batterie au lithium en desservant le prestigieux Prix Charles Stark Draper à Goodenough, Nishi, Yazami et Yoshio.
Aujourd’hui la batterie lithium-ion est utilisée essentiellement dans l’électronique portable, les véhicules électriques et dans le stockage de l’énergie en particulier solaire et éolienne. En 2014 on estime que près de 15 milliards de ces batteries ont été produites dans le monde générant un marché de près de 20 milliards de dollars US.
Rachid Yazami est cité comme inventeur dans plus de 70 brevets et poursuit un parcours d’entrepreneur dans le domaine des batteries avec la création de KVI qui développe des circuits de management intelligent de batteries et des solutions de recharge ultrarapide.